Architecture

Trois agrandissements de maison bien pensés

28 Nov 2023

S’il existe des solutions pour surélever sa maison ou lui ajouter une extension  vitrée, c’est bien souvent vers un agrandissement horizontal en dur que l’on se tourne pour gagner des mètres carrés habitables.  Or, l’adjonction d’un nouveau volume ou de nouvelles fonctionnalités à un bâtiment existant est un exercice d’architecture délicat. En effet, il y a d’infinies manières de réaliser une extension moderne sur une maison traditionnelle. En voici trois exemples dans les cantons de Genève, Neuchâtel et Vaud. Ces projets d’architectes, très bien pensés, se sont nourris d’une réflexion sur les usages liés aux modes de vie actuels autant que sur les réalités du passé.

 

Projet d’extension n°1: un grain de béton et de verre

Architecte: Yasmin Nicoucar 

Lieu: Genève

 

©Dylan Perrenoud. Parution CR 2022/2023

Un cube de béton et de verre a permis d'agrandir cette maison bourgeoise.

 

©Dylan Perrenoud. Parution CR 2022/2023

Le cube semble en lévitation.

 

©Dylan Perrenoud. Parution CR 2022/2023

Sur l'extension, une terrasse vient surplomber un terrain en pente et permet de profiter du cèdre qui date de bien avant la construction de la maison

 

©Dylan Perrenoud. Parution CR 2022/2023

Il se compose d’une unique pièce abritant la cuisine, une pièce à vivre qui se déploie face à un panorama d’exception s’étendant des Voirons au Salève et plus loin encore.

 

La bâtisse dont il est question ici a une forme de maison bourgeoise, fermière par son implantation et son apparence rustique, domestique. Elle n’est pas inscrite au patrimoine, mais dévoile un charme indéniable. Une maison située dans la campagne genevoise que Yasmin Nicoucar a pris soin de préserver tout en lui offrant une rénovation qui vient multiplier les possibilités de l’habiter. De la rendre vivante.

 

Son intervention maximale consiste en un cube de béton et touches de verre qui vient jouxter le bâtiment originel. «Mon objectif était de ne pas toucher à la maison, mais de venir à côté», explique l’architecte. Ne pas dévoiler tout de suite la nouveauté, mais longer d’abord la maison pour en découvrir ensuite l’extension. Faire se côtoyer deux époques, deux architectures. Plutôt que de les coller et d’opérer une hybridation délicate, elle a créé une sorte de respiration entre les deux bâtiments.

 

Si les deux modules constructifs peuvent sembler antinomiques, un fil d’Ariane relie le nouveau à l’ancien. La maçonnerie en béton apparent se veut complémentaire au niveau de la matérialité ; elle offre le sentiment que le monolithe a émergé de nulle part, juché sur sa hauteur, tel l’Acropole sur sa colline athénienne.

 

 


 

Projet d’agrandissement n°2: une capsule en acier, bois et verre

Architecte: Cédric Schärer

Lieu: Neuchâtel

 

©Roland Halbe. Parution CR 2022/2023

Cette ancienne demeure abrite désormais trois logements distincts. Le troisième logement, qui agrandit la surface utile, a été construit en lieu et place du garage d'origine.

 

©Roland Halbe. Parution CR 2022/2023

La construction de Cédric Schärer fait penser à la Nakagin Capsule Tower de Kisho Kurokawa, notamment par sa fenêtre en hublot.

 

©Roland Halbe. Parution CR 2022/2023

Le nouveau corps d'habitation se détache de la structure existante pour faire place à une terrasse.

 

©Roland Halbe. Parution CR 2022/2023

Le nouveau corps d'habitation abrite une typologie renversée, avec les chambres en rez-de-chaussée et les pièces à vivre à l’étage.

 

C’est une maison bourgeoise, familiale, somme toute assez commune dans sa facture avec sa pierre d’Hauterive. Pour s’adapter à de nouvelles contextualités générationnelles, le bureau de Cédric Schärer a dû jouer des formes afin de proposer trois unités d’habitation là où il n’y en avait qu’une seule depuis sa construction, en 1896, et trois entrées différentes là où subsistait une distribution centrale.

 

Le troisième logement, celui qui nous intéresse en définitive, prend la forme d’un pavillon posé sur le «Stöckli», sorte de conglomérat de fonctions comprenant un bureau et un garage. Une maison pluggée qui vient épouser le volume existant et jouer intelligemment avec le droit à bâtir afin d’obtenir un supplément important de surface utile.

 

Pour ce faire, le nouveau corps d’habitation – qui semble en suspension –a été construit en lieu et place de l’ancien garage. Le pavillon – à la manière de celui dessiné par Philip Johnson dans sa Leonhardt House – se détache de la structure existante en faisant place à une terrasse.

 

Mais cette structure construite  à l’aide d’un système hybride acier/bois qui exploite chaque matériau au maximum de son potentiel pour obtenir une structure extrêmement compacte et légère, s’inspire également, pour partie, des travaux de Kisho Kurokawa, auteur de la Nakagin Capsule Tower à Tokyo. Cédric Schärer revendique ces clins d’œil à l’architecture nippone, et il sait les exploiter à bon escient.

 

D’un côté, il a su rendre plus lisible la maison d’origine et, en la dotant d’une nouvelle unité d’habitat à la spatialité plus aérienne, a réussi le tour de force de lui offrir un rééquilibrage tout en finesse et légèreté.

 

 


 

Projet d’agrandissement n°3: une boîte dans une ancienne étable

Architecte: Atelier Nova

Lieu: Mézières (Vaud)

 

©Daniela & Tonatiuh. Parution CR 2022/2023

L'ancienne étable abrite désormais une boîte qui permet d'agrandir la surface habitable.

 

©Daniela & Tonatiuh. Parution CR 2022/2023

Les faces avant et arrière de la boîte sont illuminées par des claires-voies. À l'étage, sur une des faces du bâtiment, se trouve un balcon.

 

©Daniela & Tonatiuh. Parution CR 2022/2023

L'espace intérieur a été percé de multiples ouvertures afin d'amener plus de lumière naturelle et reconnecter les différents espaces entre eux.

 

©Daniela & Tonatiuh. Parution CR 2022/2023

Le nouvel espace abrite notamment une cuisine dont les panneaux panneaux coulissants révèlent un cellier et une surface de travail.

 

Daté de 1867, ce corps de ferme est situé à Mézières, canton de Vaud. Ici, l’opération menée par le bureau Atelier Nova a consisté en une transformation, une rénovation et un agrandissement de la surface habitable. Une augmentation pouvant aller jusqu’à 60% selon le droit rural, principalement en agissant sur l’espace anciennement dévolu à l’étable qui traversait le bâtiment de part en part.

 

Celui-ci a été entièrement vidé afin de pouvoir y glisser une boîte, un tiroir – peu importe le nom qu’on lui donne – venant se plugger à la zone d’habitation originelle.

 

Le volume a été percé de multiples ouvertures afin d’amener plus de lumière naturelle – dans la boîte d’abord, puis dans les pièces adjacentes par ricochet – et de reconnecter les différents espaces. Une fenêtre vient révéler un escalier, faire le joint entre un espace commun et un autre plus privatif. La cuisine donne désormais accès directement au séjour.

 

Cet espace nouvellement ouvert abrite une cuisine de 16 m2 aux meubles dessinés sur mesure et à l’îlot central familial. Au-dessus se trouve un bureau, pas suspendu mais presque, flanqué d’une bibliothèque et donnant sur un balcon qui apporte autant de luminosité que d’intimité.  C’est la face avant de la boîte, illuminée par des claires-voies qui modernisent subtile- ment l’existant et offrent une résonance toute particulière avec la charpente du bâtiment adjacent. Un même système a été mis en place de l’autre côté de la maison qui, lui, donne directement sur la campagne.

 

Au final, il est évident que l’ajout de cette boîte a engendré une dynamique absolument inédite à cette antique bâtisse.

 



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