Architecture

Un étang de jardin conçu comme un passage vers le paysage

14 Avr 2025

Réalisé par le bureau d’architecture paysagère vaudois Mise en Scène, ce jardin de rêve a pris place dans un simple talus aux dimensions généreuses. Pourtant, avec son étang, il semble avoir toujours été là; dialoguant en parfaite harmonie avec le paysage environnant. Le résultat d’un travail subtil sur les transitions entre les différentes zones du jardin.

 

En dénichant cette maison perchée sur une parcelle de plus de 7000m2 offrant de très vastes perspectives sur la campagne vaudoise, le désir du propriétaire qui rêvait d’un ciel immense et de grands espaces est en partie comblé. Doté d’un imaginaire nourri de jardins à l’anglaise et d’une grande sensibilité à la nature authentique, il commence à aménager son jardin en plantant des groupes d’arbres en fond de terrain. Entre cet arrière-plan et la maison subsiste un talus dégagé, d’une généreuse superficie. C’est là qu’intervient le troisième maillon de la chaîne, Julien Kellenberger, architecte paysager.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Le jardin vue en contre bas. Deux majestueux pins parasols dominent ce pan de pelouse. A l’arrière-plan, des boules d’ifs et des plantes vivaces bordent l’étang.

 

Si, au départ, l’homme de l’art est mandaté pour la création d’une terrasse en bois en lien avec la maison, une fois sur le site son inspiration galope. Il dessine alors un jardin qui dévale le talus et le déborde, avec de l’eau ruisselant dans la pente pour aller se perdre plus bas dans un étang.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Posée sur l’eau, la terrasse en bois qui touche la maison embrasse le paysage côté est et se prolonge d’un ponton qui donne accès au jardin en contre-bas

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

L'étang, pièce maîtresse du jardin.

 

Doté des pièces d’eau et d’un décor puissant, l’immense talus est devenu vrai paysage en soi, dont les limites se dissolvent dans le cadre naturel. Ainsi la maison et l’espace du jardin s’insèrent dans le panorama du grand paysage, avec des perspectives larges et s’échelonnant dans le lointain.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

L'espace jardin s'insère dans le paysage.

 

Laisser place à la spontanéité

 

Pour aboutir à ce résultat naturel, en positionnant les premiers éléments structurants, les paysagistes ne cherchent pas à tout définir ni à tout caler de manière définitive. Ils posent les bases du plan, modèlent les lignes principales du terrain, les accès, les cheminements, les buttes, les courbes, les volumes, etc. et procèdent ensuite par ajouts ou retouches successives au fur et à mesure de l’avancement du projet. Selon leurs formes et leur dimension, les divers éléments sélectionnés – pierres, plantes, arbres, marches… –viennent ensuite s’installer avec l’évidence du naturel.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Les buttes laissent place à la spontanéité.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Réalisées en chêne brut, les marches se fondent dans un tapis d’érigéron d’où s’élancent des touffes de lavandin, de gaura, de pérovskia et de saule nain.

 

S’appuyer sur les trois éléments constitutifs d’un paysage naturel

 

Le minéral tient une place essentielle dans le paysage du jardin. Charriées par le Rhône et ballottées depuis sa source, les roches le structurent, le façonnent, le modulent, et lui procurent énergie et puissance. Debout, les pierres s’érigent en muraille ; empilées, elles font naître une cascade ou simulent un éboulis ; posées, elles tracent des passages, dessinent les contours de l’étang, affleurent l’eau comme un gué, voire en surgissent telles des menhirs… Émergeant du végétal, elles semblent avoir préexisté au jardin, comme s’il était né de leur présence.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Un mélange de plante vivaces et de boules de buis bordent ce passage composé de dalles en pierre des Alpes sur lit de gravier.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Surgissant de la zone de régénération de l’étang, ce rocher pèse plus d’une tonne. Sous sa protection, les nymphéas fleurissent.

 

Le végétal foisonne et endosse tous les rôles avec la légèreté du naturel. Il s’insère entre les pierres, s’insinue entre les marches, se faufile dans les interstices, part à l’assaut d’une butte. Qu’il rampe, se répande en gerbes ou en touffes ondulant sous le vent, il semble jaillir spontanément et croître à sa guise.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Les contours adoucis des pierres de Süstens invitent à traverser. Le niwaki taillé donne une touche japonisante à la zone de filtration. Sur les berges, des touffes de thym, de ligularia et de miscanthus

 

Quant à l’eau, le jardin ne peut s’imaginer sans elle, si bien qu’on a l’impression qu’une source sous-jacente traverse la maison. Cette eau ruisselle, chevauche les pierres, éclabousse et s’élance dans une bruissante cascade retombant dans l’étang. Pièce phare de la composition, ce dernier comporte une zone dédiée à la filtration de l’eau et une autre destinée à son oxygénation, fonction assumée par la cascade. Mais l’étang offre aussi une partie plus dégagée permettant la baignade, un plaisir simple comme celui qu’en propose parfois la nature au hasard d’une balade.

 

© Sophie Franklin-Kellenberger. Parution EC2/2023

Un espace de détente et de contemplation voisine la zone profonde de l’étang. Banquette en chêne brut, brasero en acier Corten.

 

Dans ce projet complet, qui fait corps et vit avec son environnement, l’habile combinaison des éléments a créé un jardin de rêve dans un rêve de jardin !

 



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