5 choses à retenir sur l’architecte Francis Kéré
Le Prix Pritzker avait été décerné en 2022 à Francis Kéré, le premier Africain à remporter cette distinction qui équivaut au Prix Nobel de l’architecture. Le jury a salué la qualité de son travail dans des pays marginalisés, où les contraintes et les difficultés sont nombreuses et où l’architecture et les infrastructures sont absentes. L’essentiel à retenir sur le célèbre lauréat.
N°1. Il est germano-burkinabé
Diébédo Francis Kéré est né en 1965 dans un village du Burkina Faso. Il a suivi dans ce pays un apprentissage de menuisier avant de poursuivre des études d’architecture à Berlin où il fonda, par la suite, un bureau. Au cours de sa carrière, Francis Kéré a principalement construit des institutions scolaires, des établissements de santé, des logements professionnels, des bâtiments civiques et des espaces publics sur le continent africain (Bénin, Burkina Faso, Mali, Togo, Kenya Mozambique).
N°2. Ses bâtiments les plus emblématiques sont…
Le complexe scolaire de Gando (Burkina Faso), 2001
Première réalisation de Francis Kéré, l’Ecole primaire de Gando fut récompensée par le Prix Aga Khan en 2004. Elle démontra la capacité de l’architecte à utiliser de manière intelligente des matériaux locaux pour s’adapter et répondre au climat. Tout autour, d’autres bâtiments ont par la suite été construits par l’architecte comme des logements pour enseignants (2004) et une bibliothèque (2012).
Le Lycée Schorge, Koudougou (Burkina Faso), 2016
Un exemple particulièrement saisissant de la manière dont l’architecture vernaculaire peut être contemporaine. Suivant une disposition en anneau, ce complexe se compose de neuf salles de classe, réhaussées par des tours à vent qui se détachent au-dessus du corps du bâtiment.
Le Campus du Learning Lions, Turkana (Kenya), 2021
Ce bâtiment destiné aux jeunes travailleurs s’inspire des buttes imposantes érigées par les colonies de termites de la région. De hautes tours de ventilation créent un effet de cheminée pour refroidir naturellement les principaux espaces de travail en extrayant l’air chaud vers le haut, tandis que l’air frais est introduit par des ouvertures basses.
N°3. C’est un maître du low-tech rural
À travers l’ensemble de son œuvre, Francis Kéré « nous montre la puissance de la matérialité enracinée dans le lieu », explique le Jury du Pritzker. En effet, l’architecte suit toujours la même ligne directrice: des bâtiments sobres aux tons chauds (sable ou ocre) qui s’insèrent dans un paysage où la lumière est primordiale. Et cette architecture se nourrit des traditions, des besoins et des coutumes de son pays natal.
Cette approche répond, par ailleurs, à des nécessités pragmatiques: les modèles de l’architecture occidentale sont inopérants en Afrique, ne serait-ce que par la rareté de certains matériaux comme le bois, ou encore en raison de la problématique de la chaleur. Francis Kéré invente donc des solutions locales pour des coûts de construction peu élevés.
Par exemple, alors que la majorité des écoles du Burkina Faso sont construites en ciment dont l’utilisation augmente considérablement les coûts de construction et le gaspillage d’énergie électrique, Kéré utilise de l’argile que peu d’habitants considèrent comme un matériau noble. Il y ajoute simplement une dose de ciment pour consolider les murs.
Tout au long de sa carrière, Keré a développé un langage hautement performatif et expressif : les doubles toits, les murs à masse thermique, les tours à vent, l’éclairage indirect, la ventilation transversale, les chambres d’ombrage (au lieu des fenêtres, portes et colonnes conventionnelles)… Un ensemble d’éléments qui donne de la dignité au bâti et peut se mêler, subtilement, à des éléments constructifs beaucoup plus high-tech.
N°4. Son architecture rime avec communauté
Francis Kéré est un homme engagé qui vise à rétablir à travers l’architecture la justice sociale et environnementale. « Construire n’est pas un problème. Mais remplir une structure de vie, ça, c’est la vraie question », expliquait-il au journal Le Monde. Pour lui, le chemin vers la légitimité d’un bâtiment passe par la réappropriation de la communauté. « Il sait, de l’intérieur, que l’architecture ne concerne pas l’objet mais l’objectif; pas le produit, mais le processus », ont commenté les membres du Jury Pritzker.
Quel que soit le pays, Francis Kéré implique toujours les acteurs locaux dans ses projets. Son architecture se base sur le travail communautaire à travers une démarche participative des habitants.
N°5. La canopée, son symbole récurrent
Autre élément récurrent dans le discours de Kéré: la canopée, mais pas dans son acception littérale qui désigne l’étage supérieur de la forêt. C’est le principe même d’abri et d’ombrage naturel qui intéresse l’architecte parce qu’il définit symboliquement une zone protégée et un espace de rencontre.
Dans le pavillon Serpentine, par exemple, il a réussi à traduire le symbole de l’arbre dans un langage visuel universel et de manière particulièrement efficace.