Une nouvelle approche de la maison modulaire
Loin d’être synonyme d’habitat provisoire, la maison en bois préfabriquée (maison en kit) se présente aujourd’hui sous un nouveau visage. Si le principe reste toujours le même – assembler des modules prédéfinis en usine – ces petites habitations apparaissent comme une solution d’avenir pour bâtir de manière écologique et responsable. Elles pourraient même résoudre une équation impossible: favoriser le développement de maisons individuelles sans multiplier à l’infini les surfaces constructibles. Exemple avec le concept Minimhouse mis au point par l’architecte Eligio Novello du bureau d’architectes U15 à Vevey (Suisse).
La première Minimhouse a été construite par le bureau U15 à Murist dans le canton de Fribourg en 2020. Il s’agit d’une typologie de villas clés en main qui propose un scénario alternatif à la villa traditionnelle. Elle repose en effet sur un mode de construction simple, compact, aux multiples déclinaisons, qui peut être agrégé à petite échelle afin de produire des quartiers à la densification douce.
Le concept de Minimhouse prend ainsi le contre-pied des projets de grands ensembles et d’une densification «à grande échelle». Avec l’avantage de mieux répondre à l’attente de la majorité des Suisses qui préfèrent vivre dans un logement individuel avec jardin plutôt que dans un habitat collectif (Enquête sur la culture du bâti 2018).
Une maison ultra simple
Tout en visant la qualité spatiale et architecturale, l’habitation Minimhouse privilégie une approche minimaliste. Sa forme et les divers éléments qui la constituent sont ramenés à leur plus simple expression, reprenant la célèbre maxime «less is more» de l’architecte Ludwig Mies van der Rohe. Le projet propose une typologie atavique avec un volume parallélépipédique à toiture deux pans, réalisé entièrement en bois, à l’exception du radier en béton, efficace pour son inertie thermique.
La forme architecturale, la volumétrie, le mode d’occupation et de circulation sont pensés de manière à réduire et simplifier au maximum les aménagements techniques. Il n’y a du reste qu’un seul noyau technique central. Côté alimentation électrique, un câble se déroule dans un caniveau qui longe les deux façades longitudinales de la maison. Ce câble est accessible en tout temps et évite d’avoir à intégrer des câbles électriques à l’intérieur des éléments de construction.
Une maison bon marché
La Minimhouse fait la promesse suivante: accéder à la propriété pour un coût inférieur au loyer d’un logement en habitat collectif, terrain compris. Afin de favoriser une économie de moyens, l’habitation est réduite à un assemblage d’éléments prédéfinis et fabriqués en usine. La plupart des éléments, comme les cellules sanitaires, sont ainsi livrés finis. Le chantier s’en trouve simplifié et sa durée considérablement réduite : la réalisation nécessite 35 jours, du terrain vierge à la livraison de l’ouvrage.
Si dans la plupart des maisons modulaires en bois, les modules à configurer puis à assembler correspondent à des pièces (par exemple, des chambres, des cellules sanitaires, des garages…), le projet Minimhouse comprend une bibliothèque de composants très complète, allant des divers éléments de construction à du mobilier intégré.
Une maison flexible
À l’aide de cloisons démontables, d’une flexibilité des points d’alimentation électriques ou encore de performances acoustiques variables, les principes constructifs permettent un aménagement libre des espaces. Ils favorisent l’évolution de la maison au fil du temps et des besoins de l’habitant.
Une maison low-tech
Le projet revendique une architecture low-tech avec un faible niveau de technicité, ce qui limite l’impact sur le territoire et permet une autonomie du bâtiment. Le système de chauffage est limité à un simple poêle à bois. Situé au centre de la construction, il permet de chauffer toute la maison par simple convection de chaleur. Les éléments de plancher sont conçus de manière à favoriser cette diffusion de chaleur.
Le concept de Minimhouse s’insère complètement dans une perspective durable en considérant qu’un des éléments majeurs de la durabilité est l’économie des ressources et des moyens lors de la mise en œuvre. Ainsi, pour une même surface de plancher occupé, l’énergie grise de ce projet s’avère être plus faible que celle de nombreux ouvrages collectifs contemporains arborant des labellisations écologiques reconnues.
Une maison pour redessiner le paysage périurbain
Le projet Minimhouse propose non seulement un archétype d’habitat, mais aussi un nouveau type de quartier. L’ambition des architectes serait à terme de développer un principe d’agrégation dense d’habitations issues des mêmes composants que la maison de Murist, mais enrichi d’infrastructures et d’espaces publics qui renforcent le lien social.
Dans ce scénario de quartier, un ensemble d’ouvrages de taille variable serait agencé sur une parcelle commune dont l’attribution de la surface serait proportionnée à la surface de plancher habitable et au nombre d’habitants de chaque entité. Le large choix de logements ainsi proposé et les quelques règles de composition développées afin d’agréger les ouvrages pourraient permettre d’obtenir à la fois une grande mixité sociale, une qualité architecturale élevée et un tissu urbain cohérent.
Ce modèle d’agrégation dense et organique pourrait compléter des tissus existants ou proposer un nouveau tissu en frange périurbaine, capable de répondre aux mêmes critères de densité que les logements collectifs se trouvant dans ces zones (indice d’utilisation du sol de 0.6 minimum). Si son efficacité reste encore à prouver dans la pratique, un tel schéma pourrait en théorie répondre aux principes écologiques et d’économie du foncier. Il serait plus léger pour l’environnement et plus simple à réaliser et à déconstruire que d’autres projets de même densité