Róisín Lafferty ou l’art des superpositions audacieuses
Róisín Lafferty est fondatrice et directrice artistique de Kingston Lafferty Design à Dublin. Depuis 2010, elle a bâti sa réputation sur son utilisation audacieuse des couleurs et des matières et sur une esthétique tout en subtilité. Plutôt que de « minimalisme », Róisín parle « d’enrichissement » intérieur avec des couleurs, de la résine, de la laque brillante, des tons de bijoux. Aux matériaux naturels, elle préfère les bruts, plus précisément, les bois, les pierres rares, les métaux sans polissage qui se patinent. Et aux clash des couleurs, elle privilégie les déclinaisons de coloris tendres et gourmands ou les associations vibrantes. Sa patte unique se retrouve dans cette grande maison familiale victorienne des années 1950, située dans une banlieue verdoyante à quelques kilomètres de Dublin. Dans ce projet, la décoratrice a su jouer avec les époques.
Pour la décoration de cette maison, Róisín et son équipe avaient un objectif principal: créer un espace ouvert inattendu et dynamique, avec des zones définies par des ponctuations architecturales intérieures impressionnantes. « Nous avons travaillé avec nos clients pour créer des espaces que toute la famille pourrait apprécier, y compris des éléments ludiques et amusants pour les enfants.».
L’ancienne demeure a été transformée en une généreuse maison de cinq chambres réparties sur trois étages et agrémentée d’une extension qui rompt avec le parfum victorien et ses élégantes corniches néoclassiques. Pour l’extension, Róisín a choisi de jouer sur les antagonismes entre le passé et le présent.
Dans la maison d’origine, un remodelage audacieux mais respectueux du passé a été opéré. Un important travail de boiseries contemporaines a été entrepris afin de restructurer les espaces sans forcément les modifier.
Au rez-de-chaussée, Róisín a su créer un parcours visuel percutant dès l’entrée. «Le salon existant, au centre de la maison, a été ouvert pour créer une ouverture symétrique depuis la porte d’entrée jusqu’à l’extension. Cette pièce est devenue le joyau central inattendu dont nous avons fait un espace bibliothèque marocain entièrement carrelé. Nous avons conçu des sièges rembourrés encastrés pour se détendre entre la télévision et le poêle, créant ainsi un espace confortable.»
Le premier étage, qui comprend deux chambres d’enfant et une suite parentale, a été en revanche totalement reconfiguré. La zone arrière existante a été complètement redessinée et agrandie, donnant naissance à une somptueuse et généreuse suite parentale avec dressing et salle de bain, plus une nouvelle chambre de garçon avec salle de bain et une grande salle de bain familiale.
« Nous avons travaillé en étroite collaboration avec John de Noji Architects pour maximiser la lumière naturelle dans ces séries d’espaces», explique Róisín. De la tête de lit traitée comme une œuvre d’art aux miroirs des salles de bain, une grande attention a été portée aux moindres détails». S’affiche ainsi une succession de couleurs tendres et gourmandes, de juxtapositions audacieuses, et de textures poudrées.
Dans toute la maison, les meubles forment une vaste famille à la fois hétéroclite et harmonieuse comprenant des pièces signées par de grands maîtres comme Gio Ponti, d’autres par des marques de design contemporain comme Gubi, CC-Tapis et Roche Bobois, auxquelles viennent se mêler des antiquités, des cadeaux de famille, des papiers peints décoratifs, sans oublier les nombreuses pièces conçues sur mesure en faisant la part belle aux matériaux précieux.
Chaque élément trouve son emplacement idéal, greffé dans une ambiance précise. On passe d’une pièce à l’autre en suivant une séquence de décors dont chacun possède une personnalité bien définie tout en étant reliés entre eux de manière fluide. Une véritable renaissance pour cette demeure victorienne dans laquelle on devine encore la tendre collision des époques et des cultures.