Au cœur d’une école différente
À Aigle, l’école spécialisée La Monneresse accueille des enfants dont les difficultés perturbent leurs apprentissages scolaires ou sociaux. Son bâtiment, tout en subtilité, propose une conception spatiale douce et fluide, au service des enfants qui l’occupent. Un projet Translocal Architecture.
Créée en 1977, la Fondation de la Monneresse soutient les enfants et adolescents présentant des handicaps sociaux et des troubles d’apprentissage. Au point de départ de ce projet d’école se trouve la volonté du maître de l’ouvrage de répondre à la demande croissante d’un établissement scolaire pour ces catégories d’enfants, tout en développant des solutions sur mesure et adaptées.
Le projet, mené par le bureau suisse Translocal Architecture, développe ainsi une approche sensible tant dans la conception des espaces, des matériaux et de leur relation que dans le dialogue avec l’histoire du lieu et son contexte. Entre efficacité et délicatesse, il raconte la complexité de répondre à des besoins spécifiques en matière d’appréhension de l’espace.
Une typologie au service des besoins sociologiques
Le programme est divisé verticalement. Au rez-de-chaussée le socle contient l’entrée commune, le vestiaire, le réfectoire, l’administration et des salles de psychomotricité; l’étage contient les zones d’enseignement.
Afin de répondre aux problématiques sociales, la typologie propose une structure de petite échelle. Le plan sous-divise les espaces afin de réduire le nombre d’utilisateurs au sein de chacun d’entre eux, de créer des groupes d’apprentissage et de diviser les élèves par tranches d’âge.
Les salles de classe permettent une variété de configurations d’enseignement tel que l’enseignement frontal classique ou l’enseignement décloisonné.
Une bibliothèque disposée au centre du dispositif, à l’étage, constitue le cœur du bâtiment. Lieu d’apprentissage et de recentrage individuel, elle sépare et réunit les deux groupes. Les vues et ouvertures qui transpercent l’ensemble du bâtiment la rendent visible depuis toutes les classes, invitant à la lecture, l’étude et l’apaisement.
Une approche par contraste
La nécessité d’une certaine délicatesse dans le projet a induit une architecture de contrastes et d’ambiances. Celle-ci se révèle notamment dans les matérialités. Dans un contraste assumé, le béton apparent dialogue avec le bois de chêne à travers l’ensemble du bâtiment.
Le béton brut confère une certaine robustesse, en accord avec l’affectation, procurant une bonne durabilité ainsi qu’un sentiment de protection.
Le bois, présent dans les menuiseries et portes intérieures, au sol à l’étage et au plafond dans les salles de classe, apporte quant à lui chaleur, douceur et lumière. Des espaces boisés sont aussi aménagés dans l’épaisseur des murs : un élément de réception à l’entrée, des meubles séparant les espaces dans la bibliothèque, une banquette dans le foyer des clusters. Le contraste entre ces matériaux reflète le sentiment de légèreté qui règne dans tout le bâtiment.
Depuis l’extérieur, les briques de parement de couleur gris clair dialoguent avec l’EMS, deuxième projet qui occupe le site, et s’intègrent subtilement dans l’environnement. Par contraste, du métal marque l’entrée, les cadres de fenêtres et la toiture. Cette dernière –une toiture pliée à plusieurs pans – est issue d’une concession aux règles de construction, jouant sur les inclinaisons minimales et maximales données par le règlement communal. Elle confère au bâtiment une identité singulière, favorisant l’identification des élèves et du personnel enseignant avec l’école.
La lumière pour accompagnement
Dans une approche sensible, la lumière est presque traitée comme un matériau qui vient transpercer l’espace. La typologie du cluster induit une certaine profondeur du bâtiment et, par conséquent, la nécessité d’ouvertures zénithales. Celles-ci se font, en relation avec la toiture pliée, par trois lanterneaux qui éclairent stratégiquement les deux foyers et la bibliothèque. Inondée de lumière, cette dernière rayonne dans tout le bâtiment.
Dans une logique formelle, la lumière artificielle constituée d’une ligne continue au plafond reprend la forme longitudinale des lanterneaux, suit la configuration des espaces et des aménagements et induit le parcours dans le bâtiment.
De la matérialité à la lumière, en passant par la typologie spatiale, le projet reste cohérent dans sa volonté de proposer un espace adéquat à des usagers spécifiques. L’architecture participe à l’accompagnement nécessaire de ces enfants. L’identité du bâtiment résulte ainsi d’un rapprochement entre les besoins du maître de l’ouvrage et l’analyse sensible et contextuelle des multiples spécificités et contraintes rencontrées. Un processus où l’interaction des expériences individuelles donne lieu à un projet unique et adapté à son usage quotidien.