Les Espaces du design 2025
La sélection 2025 du « meilleur du design suisse » proposée par la rédaction d’Espaces contemporains, est marquée par des objets qui se distinguent par leur nouveauté, leur typicité ou leur inventivité. Une cuvée qui tend vers ce qui fait l’essence d’un design en devenir, mélange de réflexion et de création. Et où l’on se retrouve cette année avec une marque iconique, des projets qui sortent quasi de nulle part et des pièces brillant de mille feux, « améliorateurs » du quotidien qui mettent du baume à nos intérieurs. En quelques adjectifs choisis, la période 2024-2025 pourrait se définir ainsi : inclusive, collaborative et organique. Si la discipline a pu souffrir ces derniers temps et opérer quelques replis sur ses acquis en période post-pandémie, voilà qu’elle semble retrouver un second souffle. Avec un design porteur d’espoir, de positivité et d’un peu de débrouille appliquée.
1. Meilleur coup de peinture de l’année
Née en 1922, Lehni fait partie des marques iconiques du design suisse, de celles qui ont imprimé dans l’inconscient collectif les questions de fonctionnalisme et ses déclinaisons formelles. Après les signatures quasi indépassables de Max Bill ou Donald Judd, c’est au Canado-Britannique Philippe Malouin et au Français Thélonious Goupil d’imaginer des produits amenés à redonner un coup de peps à vos intérieurs en les pimpant de lignes structurellement industrielles, mais définitivement plus modernes. Une manière de perpétuer un héritage doré, mais ici fait d’aluminium et de radicalité colorée
2. Meilleur lot de vaisselle intelligente
Où il est question d’altérité, d’écoute et de sensibilité. D’une virgule au milieu d’une assiette, de fonds antidérapants ou de courbes surélevées sur des bols à müesli afin de permettre à des personnes souffrant d’un handicap physique ou d’une malformation congénitale de manger comme les autres. Autoriser une forme d’autonomie. Si le studio dversa a imaginé « kwer » comme une gamme du quotidien qui ouvre la voie à une société plus inclusive, il a réellement développé une vaisselle universelle. Une forme d’Intelligence appliquée.

Set de vaisselle universel kwer, Noëmi Burkhalter, Florian Kech et Benjamin Schalk pour dversa.studio
3. Meilleure collaboration pour tout le monde
Collection en édition limitée, celle-ci se nomme HOMEWORKS. Comme les « devoirs » sur lesquels ont potassé les étudiants en design de l’ECAL pour répondre à un cahier des charges devant jouer la carte d’objets du quotidien, volontiers grand public. Quasi une dichotomie. En résultent 38 objets qui, du rangement pratique à une forme assumée de suissitude, font l’ADN de micasa. Parmi les très belles réalisations, notons des serviettes « helvètes », une réinterprétation osée et réussie de la stabelle et des tapis qui devraient assez vite devenir des classiques d’appartement.

Collection limitée HOMEWORKS, micasa x ECAL/École cantonale d’art de Lausanne
4. Meilleures lampes de poche imprimées à la maison
Lustra est une lampe dessinée par le Lausannois Jakob Spik, imprimée en 3D à partir de matériaux biosourcés ou recyclables, et produite en petite série. S’inspirant du plissé des tissus, semblant presque pouvoir virevolter sur elle-même, elle est un quart d’heure de bonheur à contempler.
Mellow, du bureau zurichois Dehgraf, est elle aussi imprimée en 3D, sur la base d’un bioplastique haut de gamme et écologique. Cubique dans sa forme, elle brille par les bulles qui en proposent une structure plus organique. Plus lunaire également.
5. Meilleure table de salon futuro vintage
En s’inspirant de l’esthétique des colonnes romaines et d’une forme de clin d’œil au mouvement Memphis, le duo Superlife a imaginé il y a peu les lampes Romana, qu’elles soient de table, de plafond ou d’apparat. Puis, dans la foulée de la table d’appoint Imperia – une structure tubulaire et un plateau en acier inoxydable en lieu et place du globe lumineux –, ils ont dessiné Imperia Living, version basse, généreuse et carrément rétrofuturiste. Aussi caractéristique des seventies que classique des salons de demain, elle est un élément de mobilier quasi « starwarsien » dans sa version gris métallisé.

Table basse Imperia Living par Superlife
6. Meilleur objet à double tiroir
Si le tabouret est le meuble le plus discret d’un intérieur, il n’en reste pas moins le plus important tant il peut revêtir de fonctions différentes et mérite un peu plus qu’un simple regard. Celui dessiné par Anthony Guex appartient à la catégorie des escabeaux. Baptisé « Two Step », ce bel escalier composé de six planches échafaudées à la manière d’un mini château de cartes est en frêne et, de par sa double hauteur, a la capacité de servir d’échelle, de tabouret haut, d’étagère ou de table d’appoint.

Tabouret Two Step par Anthony Guex
7. Meilleure série de fauteuils qui déconstruisent nos intérieurs
Imaginés par le designer gréco-suisse Théodore Perdios, ils se nomment Johan, Lilith et Euclide. Trois fauteuils aux formes sculpturales et douces, et qui répondent chacun à des narratifs hautement travaillés. Ainsi, celui de Lilith évoquant la première femme d’Adam, supposée traîtresse et souvent représentée par un serpent enroulé. Ou celui d’Euclide, référence au théorème du même nom, représentant les axes x, y, z de l’espace. Généreux dans leurs proportions, aussi accueillants qu’impertinents, ces marshmallows géants épousent nos formes et déforment nos a priori décoratifs.

Fauteuil Lilith par Théodore Perdios (en exclusivité pour studiotwentyseven.com)
8. Meilleure collection qui pique
Brillant dans ses récentes réalisations, l’architecte et scénographe genevois Giona Bierens de Haan réalise ici sa première collection de mobilier. Une série organique et un rien piquante, clin d’œil à l’arbre qui en a été l’inspiration. Composée d’une table, d’une chaise et de deux formats d’étagères, c’est là une poignée de meubles à la croisée du design et de l’art qui donneront un côté punk à votre intérieur. Les vases et pièces en céramique, de la main d’Angeles Rodriguez, viennent compléter un ensemble d’une cohérence formelle quasi symbiotique.

Collection Ceiba par Giona Bierens de Haan
9. Meilleurs bancs de bois de bout de table
Si le tabouret est le meilleur ami de la table, le banc en est son indispensable compagnon. Facile à déplacer, notable gain de place pour empiler des hordes de convives, marqueur social pour qui veut bien s’en accommoder. Le banc est de tous les intérieurs, qu’il soit de montagne ou de campagne, et se décline avec un soin de détails qui donne largement envie d’imaginer des tablées à rallonge.
10. Meilleur fauteuil animalier
Fondateur du Studio Feixen, Félix Pfäffli est l’un des graphistes les plus créatifs et talentueux du pays. Volontiers transversal dans ses pratiques, on l’a vu récemment signer des plaids pour ZigZagZurich. La chaise Crocodile s’inspire du fauteuil Chandigarh de Pierre Jeanneret, tout en intégrant ses propres préoccupations esthétiques. Où il s’est agi de respecter l’existant tout en y amenant un nouveau langage qui respecte l’harmonie première de la chaise. En résulte une version « crocodilesque » en diable, une pièce qui est autant un hommage qu’un joli coup de patte graphique.

Fauteuil et ottoman Crocodile, Felix Pfäffli pour Phantom Hands
11. Meilleur projet de collaboration transatlantique
Chez Espaces contemporains, on aime beaucoup les collabs qui stimulent les sens. Présentée conjointement par la galerie carougeoise NOV et NOUVEL, une maison d’art verrier basée au Mexique, Reflets propose une série d’objets en verre. Parmi des vases de belle facture, on y apprécie plus particulièrement les expérimentations de Nicolas Le Moigne avec Grid, un système modulaire de briques de verre emboîtables, et celles de Laurin Schaub, dont l’ensemble baptisé «Relief» se compose de pièces s’inspirant de la structure des panneaux acoustiques en mousse.