Couleurs vintage
Entre effets de mode et quête de nouvelles expressions, le siècle dernier s’apparente à un roman de la couleur. Retour sur les couleurs vintage qui ont animé cette passionnante histoire.
Dans le creux des couleurs se cache un miroir magique qui nous révèle notre époque. En effet, le sens et le pouvoir d’attraction qu’on accorde à chacune d’entre elles en dit long sur nos goûts, notre personnalité mais aussi sur notre héritage culturel. Car les couleurs se rattachent à une époque dont elles peuvent devenir le symbole. En allant plus loin, on peut dire que chaque période ou chaque courant décoratif est représenté par une palette chromatique et qu’il est possible de parler de « couleurs vintage » ou de « couleurs du vintage ». Si les teintes, prises individuellement, ne diffèrent pas forcément radicalement d’une décennie à une autre, on constate toujours un changement d’habitude dans la manière de les associer et de les faire interagir. A cet égard, le XXe siècle aura vu défiler bien des modes, tant dans les décors que les papiers peints. Une richesse qui s’explique notamment par le développement de l’accessibilité aux peintures de couleur intense pendant cette période.
Les couleurs vintage des fifties: une intensité contenue
Dans les années cinquante, après la guerre, une nouvelle légèreté défie le côté sombre des styles classique et rustique. Les meubles s’affinent et deviennent plus hauts sur pied. De grands noms du design, comme Saarinen, Jacobsen, Eames ou Gio Ponti, dessinent des pièces qui révolutionneront le monde de la décoration. Côté couleur, outre les jaune, bleu et rose pâles déjà évoqués, les fifties voient aussi apparaître toute une gamme de couleurs beaucoup plus intenses. Ainsi, le jaune chaud et saturé s’entoure de nuances stimulantes. Celles-là contiennent souvent un peu de noir, car si l’époque est optimiste, l’heure n’est tout de même pas aux débordements: le style moderne touche encore une bourgeoisie proprette qui prône des valeurs de fierté, de maîtrise et de confort.
Les couleurs vintage des sixties: les associations audacieuses
Les années soixante sont celles de la rébellion de la jeunesse, de la joie de vivre, et cela s’exprime dans la décoration. Pour la première fois on ose associer des meubles anciens et des créations avant-gardistes. Sur les papiers peints et les tissus d’ameublement surgissent des fleurs exubérantes, des carreaux et des motifs géométriques dans l’esprit du styliste Eddie Squires. Les bruns et les bronzes font une percée significative. On les marie à toutes les couleurs, en particulier aux jaunes (voir la réédition du papier peint à grosses fleurs Star Flower chez LittleGreene), aux orange et aux roses dont la palette s’élargit. De surcroît, les nuances violettes que l’on avait un peu oubliées lors de la décennie précédente refont surface.
Les couleurs vintage de l’avant-garde des sixties: l’exubérance
Jeunesse, joie de vivre, mais aussi esprit d’aventure caractérisent les années soixante. Ces belles années sont témoin d’un atterrissage sur la lune, et les progrès techniques suscitent de nouveaux rêves de science-fiction. Certains architectes et designers se font les porte-parole du futurisme et créent toutes sortes de meubles aux formes non conventionnelles, à l’instar de Joe Colombo. Celui-là rit rapidement l’habitude de peindre le sol, les murs et parfois le plafond de la même couleur. S’il commença par utiliser des teintes issues de la nature, il se tourna dans un second temps vers des couleurs artificielles beaucoup plus vives. Un choix encouragé par le contexte, car c’est à cette époque qu’on découvre comment fabriquer des pigments artificiels résistant aux effets chimiques et aux ultraviolets. Ces teintes inspirent ainsi une nouvelle gamme de couleurs éclatantes, qui semblent vibrer et miroiter. Plus exubérante que jamais, celle-là nourrit un style pop dans lequel on mélange souvent le noir et le jaune (quand ce n’est pas le noir et le blanc) ou encore le rose, l’orange et le violet. Avis aux fans du style pop des sixties: des tissus et des tapis de Verner Panton sont aujourd’hui réédités par Maharam et Designercarpets.
Les couleurs vintage des seventies: place à la nature!
Coincées entre esprit révolutionnaire et culte du plaisir, les années septante voient cohabiter les tendances les plus diverses en matière de décoration. Entre le style néorustique guidé par Laura Ashley, le style classique-graphique inventé par David Hicks et le style pop psychédélique, prolongement de la mouvance pop, l’époque affiche son éclectisme. Or malgré l’éclectisme des influences qui agitent le monde de la maison, les couleurs du coucher du soleil et de la terre donnent bien souvent le ton. Ainsi les bruns, les jaunes et les oranges – qui étaient déjà très présents dans les années soixante – n’auront jamais autant séduit que pendant cette décennie. Comme si toute l’époque semblait vouloir se rapprocher de la nature… Du moins c’est comme ça que nous l’interprétons.
Les couleurs vintage des seventies: version pop psychédélique
Les années septante s’habillent de teintes psychédéliques et hypergraphiques. Le thème de l’arc-en-ciel fait alors sensation, que ce soit dans la mode (voir les rayures multicolores que l’on trouve sur les chaussettes, les shorts, les bonnets, les T-shirts…), dans les oeuvres de l’artiste Frank Stella, ou sur les papiers peints présentant une succession de bandes colorées. Pas de grandes différences entre la palette pop des sixties et celle des seventies si ce n’est la disparition progressive des violets au profit de divers bleus intermédiaires. Par ailleurs, on tend de plus en plus souvent à associer des teintes très contrastées, créant par là des chocs de couleurs plutôt musclés.
Les couleurs vintage des eighties: génération désenchantée
Les années huitante voient la disparition des tons orangés et bruns qui avaient dominé les sixties et les seventies. A une époque où faire carrière est primordial, le blanc et les tons pastel gagnent en importance en ce qu’ils inspirent un sentiment de luxe. Mais d’autres teintes puisent leur inspiration dans la désillusion et le cynisme qui règnent à cette époque. Le blanc et le noir sont omniprésents, heurtés parfois par la présence de couleurs vibrantes, rouge en tête. Enfin, un ton encore atypique pour l‘intérieur, le turquoise, commence à s’afficher dans nos maisons.