Le réveil de la déco d’un palazzo napolitain
Nous sommes à Naples, dans un palais princier datant de 1690, rénové une première fois dans les années 1800, inhabité pendant plus de 90 ans et renaissant grâce à l’intervention d’Antonio Martiniello (Keller Architecture). L’architecte a transformé le lieu en résidence et en atelier où s’exprime un dialogue entre les siècles.
Derrière l’imposante façade néoclassique se dissimule l’histoire d’une maison au passé illustre. Les souvenirs et les témoignages qui ont survécu au temps ornent la cour intérieure arborant le blason de la famille Ruffo di Castelcicala : Nunquam retrorsum (ne jamais reculer) ; telle est la devise qui surplombe l’escalier en roche Piperno menant à l’étage noble.

La façade néoclassique de ce palais apparaît dans de célèbres films.
En intérieur, l’atmosphère du palazzo continue d’incarner l’histoire. De la salle du paon au salon rouge Pompéi, de la toute récente chambre chinoise à la bibliothèque, les différentes ambiances s’enchaînent et offrent à chaque fois une lecture qui jamais ne trahit l’esprit des lieux. Selon la mode de l’époque, chaque pièce devait avoir une décoration spécifique, et ce qui a survécu à la patine des années a été restitué.

Le salon Pompéi.

Le rouge pompéien définit l’espace dédié au salon. Sur la table des années 1970, vases d’Andrea Anastasio et lampe de Joe Colombo. Sur la console 18e, réédition en plexiglas de la lampe Taccia d’Achille Castiglioni.

La pièce appelée la chambre chinoise.

Tout ce qui a survécu à la patine des années a été restitué.
Les pièces abritent des trésors. Les décorations orientales, par exemple, révèlent des histoires et des anecdotes d’un passé riche en culture. De même, une extraordinaire bibliothèque suspendue, des fresques et des papiers peints à la main avait été figé pendant près d’un siècle. L’architecte a ainsi souhaité que les interventions soient le moins envahissantes possible.

Dans la salle de prototypage, tables de travail en fer et en caoutchouc conçues par l’architecte. Lampe de table Tizio, Artemide. Chaises vertes, Bieffeplast.

Le papier peint de la salle de prototypage.

L’atelier de l’architecte. Au plafond, décorations orientales de la seconde moitié du 19e siècle. Table Tecno d’Osvaldo Borsani, 1958. Lampe de Charles Eames. OEuvre en néon des artistes anglais Fischerspooner.

Décoration orientale au plafond de l'atelier de l'architecte.
Selon la philosophie de l’architecte, il est clair que le patrimoine culturel ne peut être momifié ; il doit être intégré, réhabilité et relié à l’espace vécu. D’où un dialogue continue entre l’ancien et le nouveau. Cette approche prend par exemple toute sa signification dans la chambre chinoise où les espaces, décorés décorés au 19e siècle avec diverses techniques et aujourd’hui idéalement unifiés par un signe graphique contemporain : un fil orange en tissu.

Dans la chambre chinoise, les espaces sont idéalement unifiés par un signe graphique contemporain : un fil orange en tissu.
Le lieu, entre privé et professionnel, est un foyer effervescent où circulent librement famille et amis, architectes, artisans et artistes du monde entier. Autant de rencontres fécondes propices à générer de nouveaux projets.
« Mon atelier, comme ma maison, est un espace ouvert à l’échange culturel et à la confrontation créatrice. Dans une ville comme Naples, il est stimulant de développer un langage architectural dynamique. Innover, pour moi, c’est récupérer la mémoire historique d’un lieu, d’une maison, et la projeter dans l’avenir de la modernité. Je vois le passé, le présent et le futur comme un continuum linéaire. »

La salle de réunion avec ses fresques sur papier d’époque. Autour de la table Pallucco, chaises Verner Panton. Lampe Erco. Bibliothèque murale Pallucco Italia. Sculpture « Skull » d’Anna Fusco.

Les portes en plexiglas rouge mènent à la cuisine.

Dans la cuisine. Au fond, table et chaises Fiarm.

Chambre à coucher de la résidence. Au mur, œuvre de Mario Pellegrino. Fauteuil des années 60. Lit personnalisé par Antonio Giuseppe Martiniello.
L’art sous toutes ses formes relie ces pièces ouvertes et communicantes : des œuvres de Harry Pearce, de Roxy Rose, Salvino Campos, Andrea Anastasio, Ryan Mendoza, Fischerspooner et Alberto Tadiello côtoient de rares pièces de mobilier d’époque comme le bureau hollandais à abattant ou le miroir en bois sculpté de l’entrée.
Mais ici, dans une atmosphère très créative, le design explose également. Des pièces de production industrielle, d’autres délicatement ouvragées ainsi que des icônes vintage dialoguent dans un langage intemporel.

Table dessinée par l’architecte, chaises en fibres de verre des années 60 et fauteuils en éco-cuir et résine des années 70. Au mur, oeuvre d’Alberto Tadiello.

Fauteuils en éco-cuir et résine des années 1960. OEuvre néon de Roxy Rose.
Dans ce projet, l’architecture a commandé, mais dans un juste équilibre, de façon à réveiller avec délicatesse ce palais endormi et à dévoiler le côté suspendu du temps.