Design

L’équipement intérieur selon Le Corbusier

08 Août 2017

Fruits d’un puissant langage plastique mâtiné de rigueur rationaliste, le mobilier et les aménagements intérieurs de Le Corbusier témoignent d’une pratique de recherche en continuelle évolution. A l’instar de ses activités d’architecte et d’urbaniste.

 

Des premières réalisations aux concepts austères et minimalistes des années d’après-guerre en passant par les célèbres modèles des années 1920 et 1930, Le Corbusier prône un mobilier fonctionnel et standardisé qui se résume aux casiers, sièges et tables. Plus qu’une simple modification du vocabulaire, les termes «machine à habiter» et «équipement de la maison» qu’il formule dès le début des années 1920 sont la réflexion d’une profonde remise en cause de notre façon d’habiter et de se meubler. Engagé dans une croisade contre les arts décoratifs dont le point d’orgue fut l’Exposition des arts décoratifs et industriels modernes de 1925, son mot d’ordre était: «Il faut recommencer à zéro, il faut poser le problème.» Autrement dit, il est temps d’inventer l’aménagement intérieur d’un ordre nouveau.

 

Réinventer l’espace et le décor quotidien

 

C’est en 1922 que Le Corbusier installe son atelier d’architecte rue de Sèvres à Paris, où il travaille avec son cousin Pierre Jeanneret. Ils seront rejoints en 1927 par la jeune Charlotte Perriand avec qui ils collaboreront jusqu’en 1937. Responsable de l’étude, de la conception et du suivi des chantiers pour l’aménagement des maisons, Charlotte Perriand sera la cheville ouvrière des différentes réalisations de cette décennie.

 

L’agencement d’un «Equipement intérieur d’une habitation» réalisé par le trio pour le salon d’automne de 1929 constitue un des temps forts de leur collaboration. La nouvelle organisation des espaces de la maison commence à partir de ce moment-là à s’articuler sous la forme de meubles «contenants» modulables (Casiers standard) qui peuvent s’appuyer aux murs ou servir d’éléments de séparation entre différents espaces. C’est aussi lors de ce salon que sont exposées pour la première fois quelques-unes de leurs plus emblématiques réalisations produites à l’époque par Thonet. Ces meubles révolutionnaires en acier tubulaire, dont le fauteuil basculant, la chaise longue et le fauteuil Grand Confort (voir le diaporama ci-dessous), expriment les principes fondamentaux théorisés par Le Corbusier. Aujourd’hui encore, ces produits suscitent toujours le plus vif intérêt, aussi bien en raison de la qualité de leur fabrication que de leur valeur culturelle.

 

Naissance et évolution d’une collection

 

En 1964, du vivant de Le Corbusier, Cassina signait le premier contrat de licence exclusive des droits d’édition des meubles conçus en collaboration avec Pierre Jeanneret et Charlotte Perriand. Le travail de réédition commença par une première série de modèles le fauteuil basculant (LC1), le fauteuil Grand Confort (LC2, LC3) et la chaise longue (LC4) mis en production en septembre 1965.

 

Entre 1974 et 2006, d’autres modèles vinrent compléter cette première série: la table tube d’avion (LC6), le siège et le tabouret tournants (LC7, LC8), le siège de salle de bains (LC9), les Casiers standard, la table glace claire (LC10-P) et la table en dalle de marbre (LC11-P), le canapé adapté par la Fondation Le Corbusier et Charlotte Perriand en 1998 (LC5.F), la table dessinée pour la maison La Roche en 1925 (LC12) et le fauteuil réalisé pour les wagons fumoirs de la SNCF en 1931 (LC13).

 

Puis, en 2010, suivirent des réalisations d’après-guerre: le tabouret et le portemanteau du cabanon de Roquebrune (LC14, LC17), une table de conférences dessinée en 1958 (LC15) et le bureau conçu pour les chambres d’enfant de l’Unité d’Habitation de Nantes (LC16).

 

 

 

  • LC Casiers Standards, ©Cassina

    LC Casiers Standard, 1925, Cassina. Ces meubles de rangement modulaires et empilables sont des unités absolues et autonomes, qui dans les années 20 ont modifié la perception du rapport entre l’homme et l’espace habité. Charlotte Perriand les adapte en 1978 afin que Cassina puisse les produire en série. Elle introduit ainsi des nouvelle couleurs et compositions.

  • LC1, Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Cassina

    LC1 (Safari), design Charlotte Perriand, Le Corbusier et Pierre Jeanneret, 1928, Cassina. Il représente une coupure avec l’esthétique qui régnait à l’époque, et une bifurcation vers le modernisme. LC1 présente un langage minimaliste, basé sur une géométrie élémentaire, sans ornementations et fioritures. Le fauteuil est composé d’une structure en acier qui forme également le piétement.

  • LC2, Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Cassina

    LC2 Grand Confort, design Charlotte Perriand, Le Corbusier et Pierre Jeanneret, 1928, Cassina. Il offre un rembourrage surdimensionné (constituant l’assise, le dossier et les accoudoirs) qui est maintenu par une structure en tube. La séparation entre le châssis de la structure et les coussins expriment la logique rationaliste.

     

  • LC3, Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Cassina

    LC3, Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret en 1928 Cassina . Il est légèrement plus large que le LC2, de sorte que l’on puisse y croiser les jambes. C’est pour cela qu’il fut pendant longtemps considéré comme un fauteuil féminin.

  • LC4, Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret, Cassina

    LC4 (Chaise Corbu) design Charlotte Perriand, Le Corbusier, Pierre Jeanneret, 1928, Cassina. La chaise longue LC4, également présenté à l’occasion du Salon d’automne en 1928 ou elle fut particulièrement remarquée par le public et la critique, est devenue aujourd’hui un icone dans l’histoire de design du XXème siècle. Grace à son balancier ergonomique inclinable par degrés, la LC4 procure un confort surprenant, à tel point qu’elle été aussi surnommée par ses auteurs « la machine à repos ».

     


  • Portemanteau LC17, 1957, Cassina. Développé pour son Cabanon, ce produit est une réalisation d’après-guerre. Les patères en chêne massif ressemblent à des champignons.



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