L’équipement intérieur selon Le Corbusier
Fruits d’un puissant langage plastique mâtiné de rigueur rationaliste, le mobilier et les aménagements intérieurs de Le Corbusier témoignent d’une pratique de recherche en continuelle évolution. A l’instar de ses activités d’architecte et d’urbaniste.
Des premières réalisations aux concepts austères et minimalistes des années d’après-guerre en passant par les célèbres modèles des années 1920 et 1930, Le Corbusier prône un mobilier fonctionnel et standardisé qui se résume aux casiers, sièges et tables. Plus qu’une simple modification du vocabulaire, les termes «machine à habiter» et «équipement de la maison» qu’il formule dès le début des années 1920 sont la réflexion d’une profonde remise en cause de notre façon d’habiter et de se meubler. Engagé dans une croisade contre les arts décoratifs dont le point d’orgue fut l’Exposition des arts décoratifs et industriels modernes de 1925, son mot d’ordre était: «Il faut recommencer à zéro, il faut poser le problème.» Autrement dit, il est temps d’inventer l’aménagement intérieur d’un ordre nouveau.
Réinventer l’espace et le décor quotidien
C’est en 1922 que Le Corbusier installe son atelier d’architecte rue de Sèvres à Paris, où il travaille avec son cousin Pierre Jeanneret. Ils seront rejoints en 1927 par la jeune Charlotte Perriand avec qui ils collaboreront jusqu’en 1937. Responsable de l’étude, de la conception et du suivi des chantiers pour l’aménagement des maisons, Charlotte Perriand sera la cheville ouvrière des différentes réalisations de cette décennie.
L’agencement d’un «Equipement intérieur d’une habitation» réalisé par le trio pour le salon d’automne de 1929 constitue un des temps forts de leur collaboration. La nouvelle organisation des espaces de la maison commence à partir de ce moment-là à s’articuler sous la forme de meubles «contenants» modulables (Casiers standard) qui peuvent s’appuyer aux murs ou servir d’éléments de séparation entre différents espaces. C’est aussi lors de ce salon que sont exposées pour la première fois quelques-unes de leurs plus emblématiques réalisations produites à l’époque par Thonet. Ces meubles révolutionnaires en acier tubulaire, dont le fauteuil basculant, la chaise longue et le fauteuil Grand Confort (voir le diaporama ci-dessous), expriment les principes fondamentaux théorisés par Le Corbusier. Aujourd’hui encore, ces produits suscitent toujours le plus vif intérêt, aussi bien en raison de la qualité de leur fabrication que de leur valeur culturelle.
Naissance et évolution d’une collection
En 1964, du vivant de Le Corbusier, Cassina signait le premier contrat de licence exclusive des droits d’édition des meubles conçus en collaboration avec Pierre Jeanneret et Charlotte Perriand. Le travail de réédition commença par une première série de modèles le fauteuil basculant (LC1), le fauteuil Grand Confort (LC2, LC3) et la chaise longue (LC4) mis en production en septembre 1965.
Entre 1974 et 2006, d’autres modèles vinrent compléter cette première série: la table tube d’avion (LC6), le siège et le tabouret tournants (LC7, LC8), le siège de salle de bains (LC9), les Casiers standard, la table glace claire (LC10-P) et la table en dalle de marbre (LC11-P), le canapé adapté par la Fondation Le Corbusier et Charlotte Perriand en 1998 (LC5.F), la table dessinée pour la maison La Roche en 1925 (LC12) et le fauteuil réalisé pour les wagons fumoirs de la SNCF en 1931 (LC13).
Puis, en 2010, suivirent des réalisations d’après-guerre: le tabouret et le portemanteau du cabanon de Roquebrune (LC14, LC17), une table de conférences dessinée en 1958 (LC15) et le bureau conçu pour les chambres d’enfant de l’Unité d’Habitation de Nantes (LC16).